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Mars 2003

A propos du nucléaire

«Tchernobyl, Tchernobyl ! Déchets, déchets» ! Le mouvement antiatomique lance une quatrième offensive contre les centrales suisses. Le nucléaire a beau fournir une électricité abondante sans provoquer la moindre pollution de l’air, il présente deux défauts majeurs aux yeux de ses puissants adversaires mondiaux : la possibilité, pour les pays qui l’exploitent, de sauvegarder une certaine autonomie énergétique d’une part, un important manque à gagner pour les énergies concurrentes d’autre part. Ces raisons n’apparaissent pas dans les discours. D’autres arguments sont régulièrement invoqués par les militants antinucléaires. Nous publions ci-après les principaux d’entre eux, accompagnés de réponses circonstanciées. Une contribution à un important débat en vue de la votation du 18 mai prochain ?


«La Suisse peut se passer du nucléaire»

La Suisse doit sauvegarder un minimum d’indépendance énergétique, comme elle le fait dansl’agriculture également. Il s’agit de pouvoir surmonter une éventuelle crise internationale ou, simplement, de préserver une marge de manœuvre dans les relations avec nos partenaires européens. Or la possibilité de stocker facilement du combustible nucléaire, grâce à son faible volume, est un élément majeur de la sécurité d’approvisionnement du pays.


«Ensemble, le solaire et l’éolien pourront remplacer une part importante de l’électricité nucléaire»

Les installations solaires et éoliennes existantes, d’une puissance totale de 20 mégawatts environ, ne produisent que 0,03% de l’électricité suisse, malgré des dizaines d’années de subventions de plus de 100 millions de francs par an. C’est tout juste assez pour couvrir les besoins de 3 000 ménages, sur un total de près de 3 millions. A comparer aux 3 200 mégawatts de puissance des cinq centrales nucléaires suisses qui alimentent près de 3 millions de personnes en électricité.

A quoi s’ajoute le fait que les centrales nucléaires travaillent 24 heures sur 24, jour après jour, pendant toute l’année. Les installations solaires et éoliennes, elles, dépendent des conditions de rayonnement et de vent : pas de courant solaire la nuit, et le vent souffle quand et où il veut.

Près de 45 000 centrales de type Mont-Soleil (la plus grande installation existante en Europe) seraient nécessaires pour remplacer la capacité nucléaire suisse avec des cellules photovoltaïques, moyennant une surface au sol de 900 kilomètres carrés et un prix de revient du kilowattheure supérieur à 1 franc (4 centimes à la centrale nucléaire de Gösgen). On pourrait produire cette même quantité d'énergie avec 24 000 éoliennes de grandes tailles (40 mètres de hauteur, pales de 20 mètres), compte tenu d'une occupation au sol de 800 kilomètres carrés et d'un prix de 30 à 50 centimes par kilowattheure.

On saisit mieux, à la lumière de ces chiffres, pourquoi les énergies vertes peinent à décoller. Ce qui n'enlève rien à leurs qualités intrinsèques et à la nécessité de poursuivre les efforts de recherche et développement. Etant donné les immenses surfaces nécessaires à leur exploitation, l'avenir du solaire et des éoliennes se jouera toutefois essentiellement sous d'autres cieux : le solaire dans les régions très ensoleillées et peu peuplées – du tiers-monde surtout – l'éolien sur les sites côtiers régulièrement balayés par les vents. Il y a là une excellente carte à jouer pour la recherche et l'industrie suisses.


«Nos centrales nucléaires ne sont pas sûres»

Paradoxalement, les centrales en activité sont aujourd’hui plus sûres qu’à leurs débuts. Car elles ont été constamment rééquipées avec des dispositifs de sécurité de plus en plus perfectionnés. Comme si on remplaçait systématiquement les pièces de votre automobile à la moindre usure par des systèmes plus performants.

On a suffisamment de recul pour évaluer la sécurité de l’énergie nucléaire. Elle est utilisée dans le monde depuis 40 ans. Chaque année qui passe ajoute 450 années d’expériences supplémentaires (nombre de réacteurs en activité). Le moindre incident dans une centrale est aussitôt communiqué aux autres exploitants, qui peuvent ainsi effectuer des contrôles préventifs.

Cette information réciproque a permis d’améliorer considérablement les conditions d’exploitation des centrales. Aux Etats-Unis, le taux de disponibilité moyen des réacteurs est passé de 70% dans les années 80, à plus de 90% en 2000. C’est comme si l’on avait construit une vingtaine de grandes centrales supplémentaires.

Le haut niveau de sécurité et le rééquipement constant des centrales permettent d’accroître fortement leur durée de vie. Aux Etats-Unis, cinq réacteurs ont récemment obtenu un permis d’exploitation qui porte leur durée de vie à 50, respectivement 60 ans. Et il est aujourd’hui évident que les centrales suisses pourront être exploitées bien au-delà des 40 années initialement prévues


«Un accident de type Tchernobyl peut se produire en Suisse également»

Les centrales nucléaires suisses sont fondamentalement différentes de celle de Tchernobyl. Dans nos réacteurs à eau légère, contrairement à Tchernobyl, la réaction en chaîne s’interrompt immédiatement et sans intervention, pour des raisons liées à la physique des réacteurs, en cas de perte de réfrigérant. A quoi s’ajoute le fait que nos réacteurs sont protégés par un double confinement de béton et d’acier. Mais la catastrophe de Tchernobyl a été surtout provoquée par des manipulations non-autorisées qui ont déconnecté des systèmes de sécurité essentiels. Dans nos centrales, un désenclenchement des dispositifs de sécurité entraînerait automatiquement l’arrêt d’urgence du réacteur. L’affirmation «Tchernobyl peut se produire partout» est techniquement indéfendable et a pour but réel d’insécuriser les populations.

Un rassemblement des résultats des études disponibles sur les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl est périodiquement effectué. Au moins deux documents ont été rendus publics par des institutions internationales au-dessus de tout soupçon :

• une publication diffusée en 1994 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sous le titre «Nuclear Power and Health». Elle conclut que l’accident a provoqué 31 décès observables et ne permet pas de caractériser davantage de décès au sein de la population irradiée, à l’exception d’un surplus de cancers de la thyroïde, mais qui ont pu être soignés,

• une publication effectuée périodiquement par l’United Nations Scientific Committee on the Effects of Atomic Radiation, division des Nations Unies. La dernière édition, en 2001, mentionnait 40 morts, comptabilisant quelques décès survenus entre-temps, et soulignant qu’il n’est pas possible de caractériser un surplus de cancers liés à l’accident.


«L’énergie nucléaire est hors de prix»

En Suisse, les centrales nucléaires sont amorties après 30 années d’exploitation. Les ouvrages de Mühleberg, Beznau et Gösgen produisent aujourd’hui un kilowattheure entre 4 et 6 centimes, ce qui les rend parfaitement compétitifs sur les marchés suisse et européen. Aux Etats-Unis, le nucléaire est devenu la source de production de courant la meilleure marché au cours des années 90 grâce à l’amélioration de la productivité des centrales.

Entre 1978 et 1997, la France a engagé 500 milliards de francs dans la recherche, le développement et la construction nucléaires. Cet investissement lui a permis d'économiser chaque année l'équivalent de 88 millions de tonnes de pétrole, soit 60 milliards de francs d'importations. Il faut y ajouter les recettes issues des ventes de réacteurs et d'électricité à l'étranger, autrement dit, 316 milliards de francs au cours de la même période. Grâce au nucléaire, la facture énergétique du pays a été ramenée de 5,6% à seulement 1,3% du PIB.


«La radioactivité issue des centrales présente des risques pour les êtres vivants»

L'homme est constamment exposé à une irradiation externe et interne en provenance de la Terre et de l’espace. On estime à environ deux à trois millisieverts (ou 200 à 300 millirems) par an son exposition moyenne à l'irradiation d'origine naturelle, externe et interne. Son propre corps est radioactif : outre le carbone 14 (l'uranium et le radium), il contient du potassium, indispensable à la vie, dont l'isotope 40 est radioactif. Près de cinq cent mille désintégrations se produisent toutes les minutes en chacun de nous, avec l'émission de rayons alpha, bêta et gamma.

Nous sommes également soumis à une radioactivité d'origine artificielle. Qui, par exemple, n'a pas subi d'examen radiologique (0,5 millisievert pour une radiographie pulmonaire) ? Qui ne s'est jamais tenu devant un poste de télévision (0,005 millisievert par heure à cinq centimètres d'un appareil récent), ou n'a jamais porté de montre à cadran lumineux (environ 0,02 millisievert par an) ?

En fait, la radioactivité est universelle. Aujourd'hui, l'homme a si bien maîtrisé ce phénomène qu'il peut en tirer un formidable éventail d'utilisations dans la médecine, l'énergie, l'agriculture, la science et la technique. Lors d'un exposé présenté pour célébrer le récent centenaire des rayons X, le Dr André Flückiger, président du Groupement des radiologues FMH de la Société vaudoise de médecine, estimait que l'utilisation de la radioactivité en médecine a probablement permis de sauver plus de vies humaines au cours du dernier siècle que toutes les guerres ont fait de morts pendant cette même période.

Les seuils d'irradiation (en millirems)
Plus de 600 000 mrem décès rapide
200 000 - 600 000 mrem taux de mortalité variable
50 000 - 200 000 mrem possibilité statistique d'induire un cancer
5000 mrem limite légale pour les personnes exposées professionnellement
400 mrem irradiation naturelle moyenne de la population suisse
280 mrem irradiation supplémentaire maximale due à Tchernobyl
150 mrem irradiation moyenne due à la médecine
1 mrem dose annuelle supplémentaire reçue par les voisins d'une centrale nucléaire


«Le problème des déchets radioactifs est insoluble»

Il n’est pas question de nier les dangers potentiels des déchets radioactifs de haute activité. Leur gestion doit par conséquent répondre à des critères très exigeants. Par rapport à d’autres substances toxiques, tels les métaux lourds par exemple, ils présentent toutefois un double avantage : leur faible volume et le décroissement progressif de leur radioactivité. Leurs faibles volumes permettent de les conditionner, de les conserver, puis de les stocker en toute sécurité.

Les enquêtes géologiques réalisées à ce jour permettent d’affirmer que le sous-sol suisse est favorable en plusieurs endroits à un stockage sûr et définitif des différentes catégories de déchets. Cela étant, pour les déchets de haute activité, la logique technique et économique plaide en faveur d’une solution internationale, avec un à deux dépôts par continent. En Europe, le bon sens devrait favoriser une étroite collaboration entre la douzaine de pays engagés dans des activités nucléaires afin d’éviter des redondances inutiles.

Toutes les activités humaines produisent des déchets. Les déchets nucléaires présentent un avantage important en comparaison d’autres catégories : leurs quantités très réduites, qui permettent de les garder sous contrôle et de les isoler complètement de la biosphère.

Comparaison des principales catégories et quantités des déchets de la civilisation moderne (chiffres pour la France, certainement comparables avec la situation en Suisse).
Type de déchets Kilogrammes (kg) par personne et par an
Déchets ménagers 350
Autres déchets municipaux 280
Déchets industriels banals(1) 500
Déchets spéciaux(2) 300
Déchets inertes(3) 1 700
Déchets d’élevage 4 600
Déchets de cultures 1 100
Déchets radioactifs de faible
et moyenne activité (Suisse)
0,4
Déchets radioactifs
de haute activité (Suisse)
0,005
(1) Déchets sans dangers particuliers (carton, vieux papiers, verre, textiles, plastiques)
(2) Déchets toxiques nécessitant un traitement spécial (solvants, hydrocarbures, produits chimiques, batteries, etc.)
(3) Gravats et autres déchets liés à la construction, sans toxicité particulière)

«Le nucléaire est une technologie dépassée»

La valorisation de l’énergie nucléaire est indissociable du progrès technique et économique à l’échelle mondiale. C’est la maîtrise de l’infiniment petit. On peut utiliser le phénomène de la radioactivité non seulement dans la production non polluante d’électricité, mais également dans la médecine, l’agriculture, l’industrie et pour lutter contre les différentes formes de pollution. La 4e génération des réacteurs à fission est en cours de réalisation, tel le projet franco-allemand EPR, qui présentera une puissance considérable et une sécurité pratiquement intrinsèque. C’est dire si le nucléaire est une technologie de progrès.


«Le nucléaire fait obstacle au développement durable»

Il n’y aura pas de développement durable réel sans recours à l’énergie nucléaire. Dans les pays qui n’utilisent pas ou qui ont renoncé au nucléaire, l’électricité manquante provient des énergies fossiles. A l’exemple de la Suède qui importe du courant danois tiré du charbon pour compenser la mise hors service d’un réacteur nucléaire.

Le nucléaire répond aux critères du développement durable sur d’autres points : l’uranium ne sert qu’à faire de l’énergie. Ce n’est pas une matière première que l’on soustrait à d’autres utilisations. Et la densité du combustible nucléaire est cent mille à deux cents mille fois plus élevée que celle des énergies fossiles. Autrement dit, avec 1 kilo d’uranium, on produit autant de courant qu’avec 100 000 ou 200 000 kilos de combustibles fossiles.

Le retraitement du combustible présente un intérêt considérable en termes de développement durable. Il permet de doubler la quantité d’énergie que l’on peut tirer d’une même quantité d’uranium et de réduire le volume des déchets de haute activité qu’il faudra gérer.


«Les centrales nucléaires sont une menace pour l’environnement»

Le nucléaire n’entraîne aucune pollution de l’environnement. Il ne produit pas de gaz à effet de serre. Il est donc neutre en termes de changements climatiques. Depuis leur mise en service, les cinq centrales nucléaires suisses ont permis d’éviter le rejet de 500 millions de tonnes de CO2 dans l’atmosphère, tout en couvrant près de 40% de nos besoins en électricité.


«Il faut remplacer le nucléaire par de l’énergie solaire»

Un aspect déplorable du débat énergétique réside dans la mise en opposition des énergies nucléaire et solaire. Or il s’agit de la même chose. Le Soleil est une centrale nucléaire en activité. La nécessité de réduire le recours aux sources fossiles pour protéger l’environnement passe par le développement d’un tandem :

• le nucléaire dans les pays développés qui offrent toutes les garanties de savoir-faire technologique et de contrôles démocratiques,

• le développement à grande échelle des techniques solaires dans les régions économiquement défavorisées, mais qui disposent des immenses surfaces de captage et des conditionnements d’ensoleillement nécessaires.


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