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01.06.2000
Vous avez dit durable?
Vous avez dit durable?
L’atome revient sur le devant de la scène. Au moment où le Conseil fédéral présente un projet de révision législative, quatre enseignants des écoles polytechniques publient une étude qui évalue l’impact des différentes sources d’énergie en termes de développement durable. Leur conclusion: il est urgent de réduire le rôle écrasant des agents fossiles et de rendre justice aux atouts écologiques de l’énergie nucléaire.
L’étude «Développement durable et énergie» repose sur un constat initial: l’énergie est une nécessité. Elle est un facteur de survie pour l’homme, la garantie de son accès à des conditions de vie supportables et de la sauvegarde des équilibres écologiques. Cela dit, un recours irréfléchi aux sources traditionnelles entraînera l’épuisement rapide des réserves et une accumulation dangereuse des gaz à effet de serre.
Réalisé par les professeurs Gérard Sarlos et Wolfgang Kröger, et les physiciens Pierre-André Haldi et Stefan Hirschberg, ce document constitue une aide à la décision en matière de choix énergétiques. Il se veut réaliste. Premier constat: la demande en énergie va continuer d’augmenter à court et moyen termes. Or cette croissance soulève plusieurs questions importantes. A commencer par l’épuisement prévisible de certaines ressources énergétiques fossiles et le déversement dans l’atmosphère, sous forme de CO2, des masses de carbone que la nature a mis des centaines de millions d’années à constituer.
Urgence
Autre constat: le bois reste la principale, voire la seule source d’énergie pour la moitié de la population mondiale. Son exploitation intensive favorise toutefois un phénomène de déforestation qui pourrait déboucher sur un déséquilibre écologique majeur à l’échelle planétaire. Il y a donc une certaine urgence à réduire les disparités régionales, tout en favorisant l’utilisation rationnelle des matières premières disponibles.
L’humanité consomme aujourd’hui 9 milliards de tonnes d’équivalent pétrole par année. La majeure partie de cette énergie est tirée es combustibles fossiles (24% de charbon, 34% de pétrole et 19% de gaz naturel), qui entraînent toutefois le rejet dans l’atmosphère de près de 20 milliards de tonnes de CO2. 18% de l’énergie consommée proviennent des deux principaux agents renouvelables: bois et hydraulique, le nucléaire couvrant 5% des besoins.
Le monde abritera dans un délai prévisible 10 milliards d’individus. Il faudra suffisamment d’énergie pour satisfaire leurs besoins fondamentaux, mais aussi pour atténuer les effets qu’ils exerceront par la force des choses sur l’environnement. Le recyclage des matériaux, le conditionnement des déchets, le remplacement des énergies polluantes par des sources plus propres: tels sont, parmi d’autres, les défis qui sont lancés aux responsables de l’économie énergétique. Dès lors que 40% de la population mondiale n’a toujours pas accès à l’électricité, on mesure l’effort qui devra être consenti pour réaliser ces objectifs.
Diktat occidental
Comme l’a souligné lors de la présentation de cette étude M. Willy Roos, président de l’Académie suisse des sciences techniques (ASST), il ne faut pas céder à la tentation d’imposer à tous les peuples de la planète les modes de vie des pays occidentaux. Il convient en revanche de leur faciliter l’accès à un niveau d’existence acceptable pour eux, dans les espaces vitaux auxquels ils sont habitués: «Le grand défi auquel nous sommes confrontés consistera à garantir de manière durable la couverture des besoins croissants en nourriture, en eau et en énergie, sans compromettre les chances de survie des générations futures».
Les quatre experts auteurs de l’étude constatent dans un premier temps que la durabilité du secteur énergétique suppose un usage plus rationnel des agents primaires et un recours accru aux sources de substitution, à commencer par l’hydraulique, le nucléaire et les agents renouvelables, solaire et biomasse en particulier. Après avoir passé en revue les caractéristiques des différents agents, ils rappellent que chacun d’eux présente des avantages et des inconvénients en matière de durabilité.
Et de souligner à ce propos qu’un renoncement au nucléaire entraînerait à l’échelle mondiale une hausse annuelle de 8% des rejets de gaz carbonique (CO2), ce qui va à l’encontre de toutes les décisions internationales relatives à la sauvegarde des équilibres climatiques. L’étude va plus loin en préconisant un rôle accru de l’atome dans le cadre d’un «mix» énergétique propre aux exigences du développement durable.
Courage!
Pour la Suisse, une politique conforme à ces exigences repose sur une stabilisation de la consommation d’énergie en général et d’électricité en particulier, et sur le maintien en activité des centrales atomiques existantes aussi longtemps que les circonstances techniques, économiques et de sécurité le permettent. Dans tous les cas, le remplacement, même partiel, de l’électricité nucléaire par du courant d’origine fossile serait incompatible avec les exigences du développement durable.
Cette conclusion des experts suisses est conforme aux recommandations du 17e Congrès du Conseil mondial de l’énergie, à Houston: «L’énergie nucléaire devrait jouer un rôle majeur en contribuant à la fourniture d’électricité et aux stratégies de lutte contre le réchauffement de la planète». Cette exigence suppose toutefois que l’industrie prenne les mesures nécessaires pour abaisser les coûts et pour rassurer l’opinion publique sur les questions de sûreté.
Elle suppose également que les gouvernements jouent un rôle plus actif en favorisant une gestion prudente des déchets nucléaires et en dénonçant les campagnes de désinformation et de peur orchestrées par les adversaires politiques et économiques ce cette technologie. Une telle attitude suppose du courage et de la détermination. Ces qualités seront indispensables si l’on veut éviter de perpétuer le rôle écrasant des combustibles fossiles dans l’approvisionnement futur, avec tous les risques économiques, écologiques et politiques qui en résultent.
Dix questions clés
Les auteurs de l’étude «Développement durable et énergie» ont défini dix questions fondamentales, auxquelles ils ont apporté des réponses globales et circonstanciées: Energie, société, environnement: quelles relations? Comment définir le développement durable et comment évaluer les options technologiques? Quelles sont les menaces actuelles sur la durabilité? Y a-t-il des limites naturelles à la croissance? Quelles sont les ressources énergétiques à disposition? Quels sont les avantages et les inconvénients respectifs des chaînes énergétiques actuelles en matière de développement durable? Quelles perspectives les futurs développements écologiques et les changements structurels offrent-ils en termes de durabilité? L’énergie est-elle un obstacle ou une nécessite pour le développement durable? Quelles conclusions peut-on tirer pour les secteurs énergétiques et nucléaire?
Ce document de 50 pages apporte des réponses claires, bien documentées à toutes les questions posées. Il est distribué gratuitement sur demande à la Fédération romande pour l’énergie (Case postale 673, 1001 Lausanne, tél. 021/310 30 80).
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