L’ouverture totale du marché de l’électricité, un avantage pour tous

Si cela ne dépendait que du Conseil fédéral, notre marché de l’électricité serait totalement ouvert. Grâce à la liberté de choix, les consommateurs feront partie des gagnants en cas de libéralisation du marché. Les opposants, par principe, ne font pas confiance au marché et préfèrent les interventions étatiques. Certains craignent aussi les effets potentiellement négatifs de cette ouverture sur la Stratégie énergétique 2050. Un référendum contre la libéralisation du marché de l’électricité est à prévoir.

Actuellement, les Suisses paient leur électricité plus chère que ce qu’elle coûterait sur le marché libre. En effet, en dessous d’une consommation annuelle de 100 000 KWh ils n’ont pas le choix du fournisseur d’électricité. Cela concerne les ménages privés et surtout les petites et moyennes entreprises (par exemple, des entreprises familiales ne comptant pas plus de 10 salariés telles qu’une menuiserie, une boulangerie ou une boucherie). Dès le 1er janvier 2018, tous les consommateurs auront accès au marché libre. Les petits consommateurs pourront cependant toujours choisir entre le marché libre et l’approvisionnement de base régulé.

Pourtant, tout le monde ne considère pas l’ouverture du marché comme un progrès. Les opposants (p. ex. les Verts et l’Union syndicale suisse) ont annoncé l’organisation d’un référendum contre cette libéralisation. La majorité des cantons s’est prononcée en faveur d’une libéralisation du marché de l’électricité. Les cantons alpins soutiennent eux aussi l’ouverture. Mais quelques rares cantons dont Vaud et Genève, sont contre ou souhaiteraient du moins que la libéralisation ne soit pas exécutée aussi rapidement.

C’est en Suisse occidentale que l’énergie est la plus chère

Prix de l’énergie en 2015 en centime par KWh pour la catégorie H4 (4500 kWh/an : logement de 5 pièces avec cuisinière électrique et sèche-linge (sans chauffe-eau électrique).
fre-bulletin-139-elcomTA-Grafik mrue/Source: Elcom

Gagnants et perdants d’une ouverture du marché

Les consommateurs profiteront de la concurrence. Les prix sur le marché libre sont, depuis quelques années, inférieurs à ceux de l’approvisionnement de base, mais les ménages privés n’y ont actuellement pas accès. Dans le cadre de l’ouverture du marché, les clients pourront également, s’ils le souhaitent, rester au modèle actuel auprès de leur fournisseur. Il n’y aura aucune obligation de changement. Le recours au marché libre sera possible une fois par an. Les consommateurs pourront aussi choisir entre les différentes offres proposées et décider eux-mêmes du type d’électricité produite qu’ils souhaitent acheter. Cette liberté de choix est importante en particulier pour les PME. Elles seront ainsi enfin soumises aux mêmes conditions que les gros clients. Cela est d’autant plus important dans le contexte actuel du franc fort. Les petites et moyennes compagnies d’électricité suisses approvisionnent la grande majorité des consommateurs finaux dans notre pays. Après l’ouverture, le risque pour ces entreprises sera que leur clientèle existante achète l’électricité la moins chère possible à l’étranger.

Alors que les producteurs sont d’ores et déjà fortement sous pression, les distributeurs mènent pour certains (encore) une existence confortable à la faveur du monopole en vigueur. Et une entreprise qui bénéficie d’une «rente de monopole» souhaite en général la maintenir. Mais, justement, le fait que les prestataires, dans un marché ouvert, doivent s’occuper davantage de leurs clients entraîne une utilisation efficace des moyens et, par conséquent, une baisse des prix. Le marché ouvert encourage par ailleurs la recherche de solutions innovantes en matière d’offre.

Pour les producteurs, l’ouverture du marché est par contre synonyme de nouvelles opportunités. Cela explique la position des grands groupes, qui sont en faveur d’une ouverture totale. Elle leur permettra en effet de conclure un accord sur l’électricité avec l’UE. L’électricité d’origine hydraulique, très importante en Suisse, pourra aussi grâce à cette ouverture trouver un marché en Europe et jouer pleinement et de manière rentable son rôle de batterie de l’Europe.

Les craintes des opposants

Les opposants à l’ouverture du marché considèrent que celle-ci est précipitée. Ils pensent en effet qu’il faut d’abord attendre de voir comment la Stratégie énergétique 2050 sera appliquée et de quelle manière sera élaboré l’accord sur l’électricité avec l’UE. Cependant, cet argument pose un problème : selon l’Office fédéral de l’énergie OFEN, la libéralisation du marché de l’électricité en Suisse est une condition préalable à un accord avec l’UE.

Derrière tout cela se cache la crainte que la libéralisation du marché de l’électricité puisse conduire à une hausse des importations d’électricité bon marché issue du charbon en provenance de l’UE. De l’avis des opposants, les fournisseurs locaux d’énergie qui investissent actuellement dans la restructuration de l’approvisionnement énergétique pourraient être désavantagés par rapport à ces importations d’électricité de l’étranger, leurs coûts de revient et par conséquent leurs tarifs en ce qui concerne l’électricité étant plus élevés. Afin d’écarter ces risques, les opposants préconisent la mise en place de conditions-cadre adaptées (p. ex. avec une taxe efficace sur l’électricité d’origine fossile), avant d’ouvrir complètement le marché. Ils perdent de vue les avantages en termes de prix, d’innovation et de capacité d’adaptation qu’offre aux consommateurs un marché ouvert.

Conclusion

En résumé, il est vrai que l’abandon des prix fixes et régulés au profit d’une liberté de choix ne garantira plus les revenus des entreprises d’approvisionnement comme auparavant. Mais elle sera favorable pour les ménages et les entreprises petites consommatrices. Les producteurs bénéficieront aussi de nouvelles opportunités sur le marché européen, tout comme les consommateurs grâce à la nouvelle liberté de choix. Tout cela ne pourra se faire sans l’ouverture du marché. Si les petites sociétés d’électricité, les syndicats et les Verts s’associaient contre une ouverture, comme ce fut déjà le cas en 2002 lors du référendum sur la loi sur le marché de l’électricité (LME), elles pourraient la faire capoter. La multitude d’opportunités que procure l’ouverture du marché nous passerait alors sous le nez, et ce pour de nombreuses années.

Télécharger le PDF